Wednesday, March 24, 2010

L’armée en crise, risque de violences aux élections

BUJUMBURA (AFP) — L’armée burundaise, au coeur de tous les soubresauts politiques au Burundi, connaît une grave "crise" qui pourrait précipiter le pays "dans le gouffre", a averti un ministre de la Défense inquiet des risques de violences à deux mois des élections générales.

"Il se passe quelque chose d’inhabituel. (...) Depuis que j’ai commencé ma carrière dans l’armée il y a 34 ans, nous n’avons jamais connu de crise qui semble durer aussi longtemps alors que le pays traverse une période cruciale", a déclaré mardi soir le général Germain Niyoyankana.

"Si cette crise perdure, cela peut précipiter ce pays dans le gouffre", a souligné le général Niyoyankana devant la presse.

Le ministre de la Défense a fait cette déclaration le jour de l’ouverture du procès, devant le Conseil de guerre à Bujumbura, de 18 soldats arrêtés en janvier et poursuivis pour "complot militaire" et "déstabilisation des institutions".

Ce procès se déroule dans un contexte de malaise persistant au sein des forces de l’ordre.

Depuis décembre 2009, au moins six sous-officiers ont été arrêtés et huit autres militaires renvoyés de l’armée, soupçonnés d’avoir appelé par tracts les soldats à la révolte.

En février, un soldat avait été tué lors d’une fusillade déclenchée par des soldats dans un camp de Bujumbura.

"Samedi soir, un inconnu a tiré des rafales en direction de la présidence et de la 2e vice-présidence", a reconnu le ministre, y voyant l’action d’"un ennemi de la paix".

Fin novembre, des tracts distribués dans plusieurs provinces par des sous-officiers, soldats et policiers, accusaient leurs hiérarchies de favoritisme et de prélèvement non justifié sur leurs soldes. Ils leur reprochaient également d’avoir chassé les veuves de guerre des camps militaires, promettant des représailles sanglantes.

"Il y a certaines incohérences dans la loi qui nous gère jusqu’ici", a reconnu le ministre, à propos des textes régissant les conditions matérielles des militaires.

"Dès demain (mercredi), la commission de défense et de sécurité de l’Assemblée nationale va étudier (...) un nouveau texte qui va répondre aux difficultés évoquées et nous aider à dissiper tous les malentendus", a-t-il assuré.

Le général a appelé "tous les partis politiques burundais, le parti au pouvoir et ceux qui se réclament de l’opposition, à faire preuve de responsabilité".

"Depuis plusieurs mois, nous observons des affrontements entre groupes de jeunes affiliés à ces partis. Cela devrait cesser", a lancé le ministre.

AFP
"Le Burundi approche d’une échéance électorale capitale (...) Je lance un cri d’alarme car c’est la responsabilité des hommes politiques qui est engagée et cette agitation de la jeunesse (des partis) peut être une source d’insécurité qui peut avoir des prolongements que personne ne peut contrôler", a-t-il prévenu.

Le Burundi tente de sortir depuis 2006 de 13 ans de guerre civile déclenchée par l’assassinat du premier président démocratiquement élu, le Hutu Melchior Ndadaye, lors d’une tentative de coup d’Etat de l’armée, alors dominée par la minorité tutsi.

Le Burundi est dirigé par un pouvoir élu, issu de l’ex-principale rébellion hutu du CNDD-FDD. L’armée (28.000 hommes) et la police (18.000) sont composées à parité entre les deux principales ethnies.

Des élections générales, dont une présidentielle et des législatives, sont prévues à partir de mai: un test pour la fragile paix retrouvée avec le soutien de la communauté internationale.

No comments: