Thursday, February 26, 2009

Kirundo milice en formation ou sport de masse ?


Source: Iwacu-burundi.org
Par Antoine Kaburahe
Depuis deux ans, des jeunes membres du CNDD-FDD organisent des activités sportives les week-ends dans la province de Kirundo. Les rondes nocturnes, les chants et les bâtons de ces « sportifs » ne rassurent pas. C’est une milice en formation accusent des responsables de partis politiques de l’opposition à Kirundo. « Sport de masse », rétorquent les responsables du parti au pouvoir dans la province. Les reporters d’IWACU se sont rendus dans les communes de Kirundo, Busoni et Bugabira.

« Faire du sport est tout à fait normal. Mais quand c’est organisé exclusivement par les jeunes d’un même parti, cela devient inquiétant », tels sont les propos d’un habitant de la commune Bugabira qui a préféré l’anonymat. Ces activités sportives qui ont commencé, il y a bientôt deux ans, suscitent pour les uns une peur et n’augurent rien de bon. Mais pour d’autres, cela ne devrait pas inquiéter outre mesure.
Selon une personne qui a gardé l’anonymat, en plus d’être tous du CNDD-FDD, ces jeunes entonnent des chansons qui ne tranquillisent pas : « Leurs chants contiennent des paroles d’intimidation et de haine. Ils disent que si nous ne les élisons pas, nous fuirons nos maisons. »

D’après un habitant de Busoni, à côté de ces intimidations, ces jeunes extorquent de l’argent à la population à la frontière Kigeri, un passage non contrôlé entre le Burundi et le Rwanda. Comme l’indique ce dernier, ces jeunes se sont substitués aux forces de l’ordre : « Ils arrêtent les gens, demandent à tout passant pourquoi il va de l’autre côté de la frontière. Et chaque passant doit leur donner entre 2000Fbu et 5000Fbu qu’il soit Burundais ou étranger. Si tu as le malheur de refuser, tu es battu. »

Une formation militaire plus qu’une activité sportive

Un ancien militaire des ex -FAB, actuellement démobilisé et habitant la commune Busoni n’y va pas par quatre chemins: « Cette formation est en train de se passer en bonne et due forme. Il s’agit des manœuvres militaires plus qu’une activité sportive car on leur apprend à manier les armes et à se battre dans un champ de tir situé à Yanza, dans la zone Gisenyi en commune de Busoni. » Ce démobilisé affirme qu’ils ont même voulu l’intégrer mais qu’il a refusé leur proposition.

Selon lui, avant de commencer la course, ils forment des rangs et leurs chefs se mettent souvent en arrière. Ceux-ci portent des grenades et parfois même des fusils. Il ajoute aussi que ces jeunes subissent des rites d’initiations, comme cela se passe chez les vrais militaires. « Chaque jeune passe devant le rang et reçoit un coup de chacun de ces camarades. »

Un plan pour nous réduire au silence

Emmanuel Karugendo, le chef du parti Frodebu sur la colline Rambo de la commune Kirundo est formel : « Le CNDD-FDD est en train de créer une milice. Il y a trois semaines, près de100 jeunes sont partis vers 4 heures du matin sur la colline Shinge na Rugero. Ils prétendent qu’ils y vont pour faire du sport. » Mais, il s’étonne que ce sport se fait discrètement et se demande pourquoi des fois ils y passent la nuit.

Nestor Mupenzi, le président du Central des Jeunes Démocrates (CJD) du parti Sahwanya Frodebu en province de Kirundo, confirme : « Quand ils reviennent de leur soi-disant sport, chacun d’eux est muni d’au moins deux gros bâtons. Devant eux, leur chef qu’ils appellent « Colonel » porte des grenades. »

D’après Mupenzi, en plus de ces activités sportives, ces jeunes font des rondes nocturnes. « Souvent ils viennent la nuit toquer chez les partisans des autres partis politiques .Ou alors ils jettent des pierres sur des maisons de ceux qui ne sont pas membres de leur parti. »
Déo Niyongere, président de l’Alliance des Jeunes Démocrates (AJD) au sein du parti Sahwanya FRODEBU Nyakuri accuse lui aussi les jeunes du parti présidentiel : « Ils se sont constitués en groupes d’intimidation pour contraindre au silence les membres des autres partis politiques. »
D’après lui, les exercices militaires mêlés de terrorisme ne rassurent pas la population. Il précise que la commune où le phénomène s’observe le plus est celle de Busoni. Pour lui, cette terreur vise à effrayer les membres des autres partis politiques afin de gagner facilement les élections de 2010.

Même son de cloche au parti UPD Zigamibanga. Arthémon Ngendakuriyo, représentant de ce parti dans la province Kirundo dénonce les actes du parti au pouvoir : « Des jeunes font des actes d’intimidations dans toute la province. Celui qui n’est pas avec eux devient leur ennemi juré. »
Il explique que ce sont ces mêmes jeunes qui sont utilisés pour déstabiliser les activités des autres partis politiques car, dit-il, ils ont subi une formation militaire. Ngendakuriyo signale que chaque fois qu’ils hissent leur drapeau, ces jeunes dits « Imbonerakure » viennent le redescendre.

Les intimidations gagnent même le secteur de l’enseignement
Le président de l’Alliance des Jeunes Démocrates raconte que les menaces n’épargnent pas le secteur de l’éducation. Il indique qu’en janvier dernier, les enseignants membres du parti au pouvoir ont tenu une réunion au lycée de Kanyinya. Au cours de cette rencontre, il était question selon Niyongere, de se débarrasser des enseignants qui n’adhèrent pas à l’idéologie du CNDD-FDD. Les résultats se sont vite manifestés, explique-t-il. Certains professeurs se sont vus attribuer des cours dont ils n’ont pas les compétences.

Pour cela, il donne un exemple : « Je suis professeur au collège communal Rukuramigabo, de la commune Kirundo. Le directeur m’a obligé de dispenser le cours de sport alors qu’il est au courant que j’ai des problèmes cardiaques. » Il se demande si ce n’est pas une stratégie de politiser des secteurs clés comme l’enseignement. Déo Niyongere demande aux responsables du CNDD-FDD de ne plus emprunter cette voie qui n’aboutit pas. Sinon, prévient-il, « même d’autres partis ont des jeunes qui peuvent faire des actes pareils. »

Ces sportifs ne portent pas la tenue du CNDD-FDD !

Jean-Marie Pasteur Uwimana, secrétaire exécutif du parti CNDD-FDD dans la province de Kirundo rejette en bloc toutes les accusations. Pour lui, ceux qui tiennent ces propos sont à la solde de l’opposition. Il indique que c’est qui s’est passé au Rwanda en 1994 leur a servi de leçon. Il remarque que beaucoup de gens, surtout les membres de l’UPRONA, rejoignent massivement le parti au pouvoir : « Ceux qui nous accusent seraient peut-être choqués par cela. »

Quant au sport de masse qui fait couler beaucoup de salives, le secrétaire exécutif s’étonne : « Le sport n’a ni ethnie ni couleur. D’ailleurs les autorités le soutiennent. Cela ne devrait inquiéter personne. »

Il invite tous ceux qui souhaitent pratiquer du sport à le faire sans crainte. Jean-Marie Pasteur Uwimana demande à ceux qui diffusent ces « rumeurs » de ne pas désorienter la population car le parti qui a gagné les élections ne peut pas former une milice. En plus, « nous avons des Hutu et Tutsi au sein de notre parti. Cette milice serait créée contre qui ? » Il tranquillise la population car selon lui, le CNDD-FDD ne cherche pas à intimider les autres puisqu’il a des membres dans toute cette province.

L’administration est proche de la population

Gérard Ngabonziza, le conseiller principal du gouverneur de la province de Kirundo se veut rassurant : « Les membres de différents partis politiques cohabitent pacifiquement. » Il reconnaît néanmoins que certains pratiquaient du sport à 4h du matin en 2007. Mais, il affirme que l’administration leur a exigé de le pratiquer aux heures normales.

Quant à ceux qui disent que seuls les membres de la ligue des jeunes du parti CNDD-FDD monopolisent cette activité, le conseiller du gouverneur n’est pas de cet avis : « Cela n’est pas vrai parce que les sportifs ne portent pas la tenue du parti CNDD-FDD. »

Gérard Ngabonziza réfute aussi les allégations comme quoi ceux qui font du sport sont armés : « Ils portent seulement de petits bâtons pour grimper les collines et montagnes. Quand les amis de la montagne font leur marche, munis des bâtons, personne ne trouve cela dangereux ! » Il ne comprend pas d’ailleurs pourquoi seuls les membres du CNDD-FDD sont pointés du doigt alors que tout le monde fait du sport à Kirundo.

Il déplore le comportement de la population de sa province qui préfère se plaindre ailleurs au lieu de se confier à l’administration locale : « Nous recevons des téléphones des gens de Bujumbura qui s’inquiètent de la situation sécuritaire alors que nous sommes tranquilles. » Ngabonziza Gérard demande à la population de ne pas lier le sport à la politique.
A propos des accusations selon lesquelles le gouverneur ne serait pas proche de la population pour écouter leurs doléances, Ngabonziza précise que celle-ci ignore le fonctionnement de l’administration.

Selon lui, quand le conseiller tient des réunions avec la population, c’est qu’il a été envoyé par le gouverneur. Pour le conseiller du gouverneur, le problème est que la population de Kirundo met en avant la sensibilité politique d’un individu au lieu de mettre en avant sa personnalité. Il conseille à la population de se confier plutôt aux autorités avant de s’adresser aux médias.

Gérard Ngabonziza signale que le CNDD-FDD ne peut pas former une milice alors qu’on a fusionné l’armée : « Le parti au pouvoir peut-il lutter contre lui-même ? », s’interroge-t-il. Il tranquillise la population : « Des réunions de sécurité vont continuer à se tenir pour rassurer tous les habitants de la province Kirundo. »

1 comment:

Anonymous said...

Le parti au pouvoir finira avec une perte absolu,

How can this people intimidate their felllow Burundians, It is ashame to the current authority.

I hope someone will be accpuntable of this criminal groups,no matter the time....