Saturday, April 12, 2008

La descente aux enfers du pouvoir CNDD-FDD

Burundi, 2008-04-12 (Burundi Réalités Agence Presse)
Gerard Bigirimana



Le Burundi a connu de nombreux régimes politiques depuis son accession à l’indépendance nationale. Les systèmes politiques que nous avons connus au cours des années 1962-2005 ont été néanmoins caractérisés par des divisions de tous genres dues essentiellement à la marginalisation des hutu ainsi que celle des tutsi originaires principalement de la province de Muramvya.

Toutefois, certains Chefs d’Etat burundais parmi lesquels le Président Jean Baptiste BAGAZA ont fait montre, malgré leur penchant au népotisme, de leur capacité à diriger le pays en faisant appel aux hommes qualifiés dans tous les secteurs de développement national. Pour leur part, les Présidents Pierre BUYOYA et Domitien NDAYIZEYE n’ont pas manqué, malgré leur penchant au clientélisme dans les nominations aux postes de décision, de privilégier la compétence et le professionnalisme. Ils n’ont pas hésité non plus à rendre efficace les mécanismes de contrôle et de sanction contre toute tendance à perturber l’ordre, la sécurité ou à saper les efforts d’unité nationale et de développement.

Afin d’asseoir davantage une paix durable et consolider les idéaux de moralité publique de même que les principes de démocratie retrouvée, le Président Domitien NDAYIZEYE n’a pas hésité à faire des concessions substantielles au Parti CNDD-FDD en lui accordant notamment le poste de Ministre d’Etat Chargé de la Bonne Gouvernance avec rang et avantages dus à un Vice- Président de la République. Un autre Ministère non moins important (Ministère de l’Intérieur) fut également cédé à ce Parti alors qu’il n’avait aucun droit de revendiquer autant d’avantages parce qu’il n’avait conquis une quelconque localité du pays encore moins gagné la guerre contre les Forces Armées Burundaises. Voilà un exemple éloquent du sens élevé de l’Etat et de l’intérêt général qui doivent caractériser un homme d’Etat. Malheureusement, ce n’est pas le comportement que le Président NKURUNZIZA affiche à l’égard du FNL-PALIPEHUTU !

En votant massivement pour le CNDD-FDD, nous avons tous cru que le changement auquel aspirait le peuple burundais allait enfin se matérialiser à travers les actions du nouveau pouvoir. N’aurait-il pas été injuste de s’imaginer le contraire? Hélas, nos espoirs se sont vite éclipsés. En effet, le Pouvoir CNDD-FDD ne s’est jamais rendu compte que les meilleurs programmes ne valent que ce que valent les hommes chargés de les faire exécuter. Or, le pouvoir CNDD-FDD n’a pas cette catégorie d’hommes et ne voudrait même pas en avoir pour qu’ils puissent lui apporter leur contribution dans la gestion du pays. C’est pourquoi nous assistons souvent à des incohérences et des contradictions malheureuses entre le discours et les engagements du Président de la République envers la population burundaise!

Le tableau est devenu plus sombre depuis le mois de Février 2007; le pouvoir CNDD-FDD ayant totalement perdu la pédale. On assiste impuissant à des divisions internes et à une grogne permanente caractérisées entre autres par l’inexpérience des cadres nommés par le Président de la République sans consulter son Parti, l’absence de compétences et de savoir-faire, la corruption qui gangrène l’Administration publique, le pillage systématique des deniers publics, son refus à partager équitablement avec le Président du Parti les dividendes du pétrole nigérian, la tricherie constatée dans l’opération de démobilisation etc.

De même, le pouvoir CNDD-FDD doit reconnaître -honnêteté politique oblige- que depuis que le Burundi existe comme nation indépendante et libre, c’est la toute première fois que son peuple fait face à une situation politique, économique et sociale aussi dramatique. De 2005 à 2008, la situation générale du pays est catastrophique à la suite notamment de la dégradation effrénée des droits fondamentaux de la personne humaine, de l’instabilité politique caractérisée essentiellement par des blocages à l’Assemblée Nationale, des remaniements ministériels récurrents et mal conçus, de la dévaluation répétitive de la monnaie burundaise, des grèves incessantes dans les secteurs de l’enseignement et de la santé publique, de la flambée des prix du carburant avec comme corollaire la hausse des prix des denrées alimentaires, de la pauvreté qui frappe impitoyablement toutes les couches les plus vulnérables de la société burundaise, de l’inefficacité de l’Administration CNDD-FDD, des tueries dans presque toutes les localités du pays etc. Des voix s’élèvent un peu partout à l’intérieur et à l’extérieur du pays pour décrier cette situation qui met en péril la vie de toute une nation. Malheureusement, aucune action sérieuse n’a été entreprise par le pouvoir pour mettre fin à ces défaillances du régime CNDD-FDD !

Cette situation devient de plus en plus dramatique à cause de l’inexistence d’une politique du commerce intérieur adaptée aux réalités économiques de notre pays. Ainsi, la stabilité des prix qui constitue un des éléments essentiels de la politique du commerce intérieur de chaque pays devrait être une priorité absolue. En effet, il n’y a pas de stabilité des prix quand il n’y a pas de rigueur dans la fixation et le contrôle des prix. Or, tel n’est pas le cas pour le pouvoir CNDD-FDD. L’exemple le plus éloquent est la façon dont est géré le dossier du carburant; l’augmentation des prix du carburant au Burundi est faite dans la complaisance. En effet, il est scandaleux qu’un pays aussi pauvre que le Burundi puisse se permettre le luxe de monter les prix du carburant autant de fois en moins de six mois oubliant volontairement que le Burundi se trouve aujourd’hui en dernière position dans la catégorie des pays pauvres les plus endettés. Tout le monde se demande où est allé le Fonds Spécial Carburant, élément de régulation chaque fois qu’il y avait augmentation des prix du pétrole au niveau mondial. Tout le monde s’interroge également sur la destination de la manne pétrolière que le Nigeria octroie chaque jour au Burundi.

Toujours est-il que les députés attendent impatiemment la reprise des travaux pour relancer la requête relative à la création d’une Commission d’Enquête Parlementaire sur le dossier carburant nigérian dans lequel sont impliqués les plus hautes autorités du Pouvoir CNDD-FDD. Quand bien même l’Honorable Jérémie NGENDAKUMANA ne l’entendrait pas de cette oreille, les Honorables Léonard NYANGOMA et Alice NZOMUKUNDA sont déterminés à étaler ce dossier au grand jour en vue d’apporter une lumière sur la gestion opaque du Pouvoir CNDD-FDD en ce qui concerne notamment l’aide au développement. Il s’agit d’une mission périlleuse car tout burundais qui a osé lever son petit doigt pour dénoncer les non-dits des relations qui existent entre le pouvoir CNDD-FDD et le courtier nigérian, Monsieur AKPAN EKPENE, s’est retrouvée dans les filets du service de renseignements et devient ainsi la bête noire du régime CNDD-FDD.

Aujourd’hui, la liste des personnalités que le pouvoir surveille de très près à cause de leur intérêt ou tout simplement de leur sentiment de curiosité à ce dossier est longue. Certains sont déjà en prison ou sont passées par là et risqueraient d’y retourner. Il s’agit du Président Domitien NDAYIZEYE, du Président Pierre BUYOYA, de l’Honorable Hussein RAJABU, de l’Honorable Alice NZOMUKUNDA, de l’Honorable Léonard NYANGOMA, de l’Honorable Mathias BASABOSE, l’Honorable Ambassadeur Hassan RUKARA, de l’ex Ministre des Finances Madame Denise SINANKWA, Monsieur Athanase GAHUNGU, de l’ex Ministre du Commerce et de l’Industrie, Monsieur Thomas MINANI, du Porte Parole du Parti SAHWANYA FRODEBU, Monsieur Pancrace CIMPAYE, Monsieur Dieudonné NGOWEMBONA, Monsieur Martin MBAZUMUTIMA, de l’Ambassadeur Jean RIGI et de l’Ambassadeur Joseph GAHUNGU. Ce dernier a été renvoyé de son poste de Chef de Cabinet en raison, paraît-il, de l’incompétence alors qu’en réalité c’était à cause du dossier pétrole nigérian. Il en va de même de Monsieur Eddy MBONA, ex Conseiller d’Ambassade du Burundi au Nigeria, tous deux limogés sur injonction du courtier nigérian, Monsieur AKPAN EKPENE.

En attendant que l’Assemblée Nationale souscrive à cette requête du parlementaire NYANGOMA Léonard, il est impérieux que le Gouvernement change de comportement quant à la gestion des affaires publiques. Il faut obligatoirement restaurer le Fonds Spécial Carburant qui serait alimenté par le produit de vente du carburant nigérian. Il importe également d’emprunter la voie la moins chère par rapport aux corridors Nord et Sud. Il s’agit de la voie lacustre qui relie le port de Kigoma à celui de Bujumbura en utilisant des bateaux pétroliers existants. Il faut enfin encourager la production agricole à travers une transformation des structures de production sur toute l’étendue du pays.

Enfin, nous tenons à rappeler au pouvoir CNDD-FDD que le Burundi a énormément besoin d’initier des réformes économiques importantes en vue de rétablir des équilibres macro-économiques. Il lui est par conséquent recommandé de cesser de se complaire dans la malversation, la corruption, le pillage des deniers publics et des tueries qui gagnent du terrain un peu partout dans le pays sinon le pouvoir CNDD-FDD serait entrain de creuser sa propre tombe avant 2010.

Gérard BIGIRIMANA gerard.bigirimana@gmail.com

Sources: Burundirealite Click here

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